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Autour d'un café : Hervé Trouillet - animateur français - partie 2
Rapide copié/collé des faits pour ceux qui dorment (la flemme de trouver une autre intro) :

Hervé Trouillet (RV), jeune animateur français, nous livre dans une discussion animée avec moi son point de vue et ses idées sur l’animation. Au cours des différentes parties de cette entrevue, de nombreux sujets seront abordés. Avant toute chose, je vous invite à visiter http://www.rvanim.com pour visionner quelques morceaux de son travail.

N.B. : Cher lecteur, les propos tenus ici l’ont été dans le cadre d’une discussion. Il ne s’agit ni de vérité universelle, ni de vérité proclamée, il s’agit juste de points de vue qui n’engagent que leurs auteurs respectifs.



Partie 2 :
Les inspirations – Musiques, Images, films, réalisateurs...

Où l’on parle des choses qu'on aime bien et qui nous inspirent.


ADAm : Pour revenir à tes projets : dans le trailer du Cycle des 9 Lunes, il y a la musique de Prodigy (The Fat Of The Land - Smack me Bitch Up) et dans Citeria, "Requiem for a Dream". Cela laisse entendre certaines influences musicales ?
RV : Effectivement je suis aussi sensible au son qu’à l’image. Pour moi c’est impossible d’appréhender l’un sans l’autre. Quand je commence à travailler j’ai un rythme, une musique dans la tête. Il s'avère que je voyais bien, par exemple, la musique de Requiem pour Citeria, pour plusieurs raisons d’ailleurs. C'est même un peu stratégique je dois dire : d’abord pour ceux qui n’ont pas vu le film, cette musique est un chef-d'œuvre pour moi, alors, je me la suis appropriée et j’ai un grand plaisir à la faire découvrir à d’autres. Et pour ceux qui ont vu ce film, elle est synonyme d’ambiance très noire.



Ambiance noire et descente aux enfers pour Citeria


ADAm : C'est aussi la descente aux enfers qu'elle symbolise ?
RV : Voilà, j'illustrais par cette musique ce côté noir sans rien faire. Je fais donc appel à l’inconscient du spectateur, cela me mâche un peu le boulot je dois dire.
Mais je l’ai un peu retouchée pour qu’elle soit utilisable dans ce teaser. Je l'ai accélérée, j'ai mis un rythme et créé quelques sons... Et ça me permet de suggérer des choses au-delà des images.
Si j'ai utilisé Prodigy pour Le Cycle des 9 Lunes, outre le fait qu’elle soit supra-dynamique, c'est parce que je voulais me dégager de l’étiquette plutôt médiévale, et que Prodigy c'est très moderne. Je ne voulais pas que cela soit assimilé à du médiéval pur. Prodigy c'est un peu électronique, forcément, ça a annulé ce côté-là je pense. Cela donne un côté nouveau.




Médiéval à la sauce Techno/Electro. Mélange déroutant et appréciable


ADAm : Donc, la musique accentue et contrebalance ?
RV : Ben oui, c'est une forme d'expression. On ne fait pas un film sans penser à la musique.

ADAm : Ah mais oui, de toute façon, un film c'est un tout : c'est l'image, le scénario, la musique... Et puis après, on dérive vers le jeu vidéo qui devient un aboutissement.
RV : En plus à travers le jeu vidéo chaque individu peut se faire un scénario personnel, c’est intéressant. Mais, le problème du jeu vidéo c'est aussi que comme c'est plus global, on ne peut pas faire passer de message précis comme dans un film. Mais, c'est sûr que c'est un aboutissement. C'est un peu le spectateur qui s'approprie l'univers de l'artiste.
Ceci dit, moi, je préfère raconter mes histoires car ce que je trouve intéressent dans un film c’est de faire réfléchir un spectateur sur une idée. Ce qui est marrant, par exemple, c’est de l’amener sur des fausses pistes pour qu’il prenne conscience de certaines choses, puis, d’un coup, on lui donne une certitude qui s’avère par la suite fausse. Donc, c'est pour ça que c'est mieux quand tu donnes la direction, toi, que lorsque la personne a le choix.

ADAm : J'imagine que tu as des réalisateurs qui t'ont inspiré, des films qui restent marqués dans ton esprit. Peux–tu nous dire lesquels ?
RV : Mes influences directes, par exemple, pour le Cycle des 9 Lunes, seraient : "Le Bon, la Brute et le Truand" sans hésitation ; puis "Conan le Barbare" bien sûr...
Après, j'en ai des wagons en fait : Tarantino évidemment. Il y a énormément de séries aussi qui m'inspirent, des séries animées comme "Cobra", par exemple, qui est pour moi une référence et plus récemment "Cowboy Bebop", évidemment. Donc, les séries d'animation, ça c'est clair. Il y a également des choses comme "Akira" qui est un film culte ... Et tout ce qui va avec. Enfin bon, à mon avis, on doit tous avoir les mêmes vidéothèques.
Mais, il y a aussi des choses moins marquées par l’univers que j’aborde, comme "Le Roi et l’Oiseau".

ADAm : Dans le trailer d'Annecy, peut-être que je me trompe, mais après coup et en y repensant, dans le genre un peu trash des lapins, j'ai vu du Burton. Inspiration "L'étrange Noël de Monsieur Jack" ?
RV : Ben c’est très flatteur ! C’est vrai ça fait partie de mes inspirations forcément, après il y a des influences indirectes, dont je ne suis pas ou plus conscient. Aujourd'hui, on se nourrit d'un peu tout. Forcément, il y a des choses qui ressortent. C’est en prenant du recul que l’on s’en aperçoit. Par contre, il y a un vrai clin d'œil dans le trailer d'Annecy sur "Vampire Hunter D" : la séquence d'ouverture avec la Lune. Je ne sais pas si tu as vu "Vampire Hunter D" ?



Clin d'oeil à Vampire Hunter D. Inspiration Burton ?


ADAm : Non, jamais, je n’ai pas eu la chance.
RV : C'est un super film d'animation. C'est vraiment pour moi une référence.

ADAm : Avec le design de Yoshitaka Amano en plus.
RV : Ce fût pour moi une référence directe. D'ailleurs, il n’y a pas beaucoup de personnes qui l'ont vu, et c'était assez marrant.
C'est clair que dans les influences directes j'ai "Conan le Barbare" que j'adore, "Starship Trooper" parce que c'est un film à plusieurs lectures. Après j'adore les choses complètement décalées. J'adore au niveau français tout ce que font Albert Dupontel et Benoit Poolvorde. Sinon, j'aime bien le cinéma asiatique. Je trouve que la Corée fait de très bonnes choses. Sinon, si tu veux encore des références, dans l'animation j'en ai plein : j'ai "Blood", j'ai "Perfect Blue", les productions Ghibli, avec forcément Miyazaki, etc...

ADAm : D’ailleurs, pour toi, s’il ne devait rester qu'un seul Miyazaki ce serait lequel ?
RV : C’est très difficile comme question, mais bon, je pense que ça serait peut être "Princesse Mononoke".

ADAm : J'aurai répondu ça aussi !

RV : Mais c'est parce que j'ai une approche différente. Si tu veux, moi, j'ai envie de m'attarder sur des choses un peu moins poétiques et symboliques, non pas parce que je n’aime pas, mais parce que je préfère être plus direct, après chacun sa sensibilité. Moi, je vois bien un dessin animé qui pourrait se tourner en live (avec de vrais acteurs) tu me diras où est l’avantage ? C’est pourtant évident, avec l’animation on peut non seulement tout se permettre mais surtout on peut designer l’univers. Imagines un scénario, par exemple Se7en, en animé avec les plans travaillés comme une BD... C'est ça l'idée.

ADAm : Ben oui ça rendrait bien.
RV : Énormément de gens adhéreraient à ça, je pense.

ADAm : En parlant de Se7en, derrière Se7en, il y a quand même un réalisateur qui a un certain talent. La façon dont il fait bouger sa caméra. On le voit d'ailleurs bien dans ses films. Dans son dernier : Panic Room - même si en terme de scénario ce n'est pas le meilleur – il y a des plans où il fait des choses que personne n'a jamais fait. Et je me dis : peut être que si Fincher faisait de l'animation, on verrait des choses qu'on a pas eu encore la chance de voir.
RV : Et oui, c'est clair. En faisant du character design, on raconte aussi autre chose, grâce à un univers. C'est le problème du film, ça enlève ce côté graphisme. Par exemple, Star Wars, c’est un exemple tout simple et très parlant : si tu as l’occasion, regardes l'artbook de l’Épisode 1 et tu vas voir le niveau des recherches graphiques, c’est hallucinant ! Même "Jar Jar Bins", personnage que je n’affectionne pas, a de la gueule et tout cela on ne le retrouve pas vraiment dans le film, c’est dommage. Il y a aussi X-Men, Hellboy... Parce que ça y va en ce moment...

ADAm : Ah oui, ils ont trouvé le filon !
RV : Justement, c'est parce que y a un public qui est réceptif à ça. Et ils sont en train de l'exploiter tout simplement. Mais je trouve que l'on perd un peu de puissance avec les films. J'imagine moi X-Men mais en animation travaillé un peu à la "Blood" ou à la "Cowboy Bebop" par exemple.

ADAm : Oui, à la "Cowboy Bebop", ce serait pas mal.
RV : "Cowboy Bebop", c'est plein d'idées ! Par contre, d’un point de vue général, le problème de l’animation japonaise c’est qu'elle est très marquée par la culture asiatique, avec ses codes et ses symboles, pas forcément compréhensibles par tous. Cependant, leur mise en scène est quand même reconnue mondialement. Quand on voit la mise en scène de "Cowboy Bebop" le film, le découpage est quand même assez exceptionnel. Ce que je veux dire, c'est que c’est très rare de voir un découpage aussi efficace... C'est génial de pouvoir réaliser cela ! Alors pourquoi ne pas récupérer leur mise en scène, leur savoir faire à ce niveau-là, au service d'un scénario que les occidentaux peuvent comprendre. Tout simplement. Un manga à l'européenne si tu veux.

ADAm : D’accord, je vois un peu l'idée : ce serait un mélange de tout ça. Et, pourquoi pas à ce moment-là relancer des co-productions franco-japonaises comme il y en a eu à une époque avec les Cités d'Or, par exemple...
RV : Ouais, mais tu n’as pas forcément besoin de japonais pour faire de l’animation avec leur mise en scène. C’est marrant parce que tout le monde a tendance à faire ce genre de raccourci ! Par exemple, j’ai souvent cette conversation avec les producteurs : je leur dis : "On peut faire de l'animation en France aujourd'hui grâce aux nouvelles technologies", et ils me répliquent souvent : "Oui mais y a pas d'animateurs en France" ; et, je leur répond ma phrase fétiche : "Vous croyez qu’en Corée ils naissent avec un gène de l'animation ? Ils sont tous des animateurs nés ?". Il faut simplement qu’il y ait un travail de formation. Tout le monde est capable de le faire, surtout en France. Je n'ai fait aucune école d'animation, je suis un autodidacte, ça prouve bien que l'animation c'est quelque chose qu'on a ou qu'on a pas et qu'il faut travailler. Donc, c'est inutile d'aller chercher des gens ailleurs quand on les a sur place...

ADAm : Donc, ça revient un peu à ce qu'on disait au début, que les producteurs se tournent vers l'intérieur du pays plutôt que d'aller voir autre part parce qu'ils se disent que l'on est incapable de faire ça.
RV : C’est surtout à la base un problème de coût. Et c’est vrai qu’au début, ils n’avaient pas trop le choix. Par contre, aujourd’hui, grâce aux nouvelles technologies, ce n’est plus un problème. Il faut simplement trouver des gens qui s’y penchent, avant que d’autres ne le fassent.

ADAm : L'ordinateur est devenu un outil, plus qu'autre chose. C'est un peu comme l'histoire des films 3D tout à l'heure. L'ordinateur c'est un outil, ça ne doit pas devenir le seul élément pour faire un film, ça doit simplement servir le travail de l'animateur pour lui permettre de gagner du temps... Comme le fait Miyazaki en l'utilisant juste pour certains effets d'eau ou de flammes.
RV : Tout simplement pour optimiser, voir quand il n’est pas nécessaire d’animer à la main alors qu’il y a des softs qui permettent de le faire, et savoir quand, au contraire, il est indispensable de le faire à la main pour des raisons artistiques évidentes. C'est ce que j’aimerais faire, c'est-à-dire le compromis entre l'animation traditionnelle et l'animation numérique.


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Le 02-11-2004 à 15:32:46 par : ADAm et RV

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