Lorsque Hodaka débarque à Tokyo après avoir fugué de son île natale, il y découvre une ville pluvieuse et morose. Livré à lui-même, le jeune lycéen apprend rapidement à se débrouiller au cœur de cette jungle urbaine grâce à ceux qui sur son chemin lui ont tendu la main, et parmi eux, la très surprenante Hina…
Le jour où il découvre le don exceptionnel de sa nouvelle amie, tous deux n’hésitent pas à mettre à profit ce pouvoir au service des habitants de la mégalopole, las de cette pluie devenue incessante. Mais sera-ce sans prix à payer pour ces deux âmes qui ne pourront dès lors compter que l'une sur l'autre et auxquelles le sort de la ville est désormais lié ?
- Kenji Shinoda -
Critiques
Makoto Shinkai poursuit ici son étude sur les thèmes de la séparation et de l’amour impossible (entre autres). Si les protagonistes, une nouvelle fois de jeunes adolescents (soupirs de lassitudes), ont peu d’épaisseur, 5 Centimètres par Seconde nous avait démontré par le passé que cela n’était pas une condition nécessaire pour atteindre les sentiments du spectateur : l’universalité et la force du sujet suffisent.
Toutefois, lorsque surviennent les moments dramatiques du film, je n’ai pas vu en moi se refléter le déchirement tant éprouvé par les protagonistes principaux. Pas même face à leur détermination impétueuse lorsque ceux-ci s’emploient à surmonter les obstacles qui les séparent de leur but. Pourquoi ?
Est-ce parce qu’au fil de l’histoire, on voit poindre les contours d'une fin convenue ? Serait-ce causé par la lassitude qu'un amateur d'animés de longue date éprouverait vis-à-vis des amourettes lycéennes banales ? Peut-être parce que, en comparaison, 5 Centimètres par Seconde et Garden of Words sont eux au contraire marqués par une maturité de ton ainsi que par leurs conclusions cathartiques ? Catharsis d'ailleurs absente malgré les épreuves endurées par les héros. Impression déjà relevée avec Your Name et Voyage vers Agartha : serait-ce dû à l'insertion du fantastique au récit ? En effet, j'ai cette conviction que l'intervention d'élément surnaturel dans la résolution, presque simpliste, de l'intrigue ôte à cette relation toute sa profondeur, sa gravité. L'air de dire « il n'y a pas de quoi s'en faire, la magie est là pour rattraper les vicissitudes de l'amour ».
Tout ceci a au final marqué le film par l'absence d'un sentiment doux-amer, qui a précédemment fait la force de Shinkaï: nous pourrions même parler d'une signature. Ceci étant, c'est ici un regret particulièrement subjectif. En effet, dans ces précédentes œuvres, ce mélange doux-amer donc, étaient à mes yeux l'apothéose d'une certaine poésie mélancolique qui s'en exhalé et que je n'ai malheureusement, pour ma part, pas retrouvé ici.
S'il y a rupture au niveau de l'histoire, l'efficacité de la narration, elle, est de nouveau au rendez-vous grâce un rythme et un découpage qui parviennent malgré tout à tenir l'intérêt du spectateur toujours éveillé (succession d'asyndètes temporelles et de moments vécus à vitesse réelle)
Ajouté à cela, les situations comiques sont bien amenées et surtout correctement dosées au cours du film.
Petit bémol, la raison de sa fugue reste assez évasive et l'évocation fugace de son passé familial n’est en fin de compte qu’une fausse piste car elle n’aboutit à aucun développement.
Visuellement que dire si ce n’est que c’est du pur Makoto Shinkai : comme à son habitude, le réalisateur japonais nous fait profiter de son génie pour les couleurs avec une très riche palette qui viennent apporter toute les nuances nécessaires. De même, on retrouve à nouveau des traits de personnages, toujours aussi sommaires, avec des visages assez quelconques, qui contrastent étonnamment avec le réalisme et l’abondance de détails des lieux. Mais ces visages « effacés » ne seraient-il pas une manière d’affirmer la prééminence des relations nouées sur des personnages apparaissant dès lors secondaires, servant tout juste de réceptacle aux sentiments de cette romance ? Enfin, je garde également une réserve car je ne comprends pas toujours le recours à la CGI à certains endroits, d’autant que la dissonance engendrée dénote avec ce feu d’artifice de nuances chromatiques et a tendance à nous extirper du tableau.
J’ai apprécié l’idée d’utiliser des chansons pour faire la transition entre les différentes parties du récit. Les morceaux sont sur le ton du film. Sans être mauvais, je ne les ai pas trouvés particulièrement marquants. Attention toutefois au dosage incongru du volume à ces moments-là qui se révèle être… trop retentissant !
En résumé, Les Enfants du Temps a été pour moi une relative déception du fait du traitement assez superficiel dans la construction des sentiments liant les personnages principaux. On ne s'y ennuie pas, seulement on reste continuellement dans une forme d’attente, attente de cet élément de cristallisation bouleversant mais qui n'arrive jamais.
Makoto Shinkaï a-t-il voulu mettre davantage l’accent sur l’action au dépend d’une attention portée sur les cœurs plus superficielle, ceci afin de s’adresser à un public encore plus jeune ?
- Kenji Shinoda -
Note de la rédaction
• Comme l'a confirmé le réalisateur au cours de différentes entrevues, Les Enfants du Temps et Your Name prennent place dans le même univers, à quelques années d'intervalle, ici en 2021:
- on retrouve Taki , qui se trouve être le petit-fils d'une des clientes, Fumi Tachibana.
- la grand mère de Taki porte un bracelet tressé que Mitsuha lui avait offert à son époque, comme s'est plu à l'imaginer l'auteur.
Bande annonce
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